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La CN2i sera-t-elle absorbée par La Presse?
Publié le 01 févr. 2025

Par Stéphane Desjardins
La Coopérative nationale de l’information indépendante (CN2i) est à la croisée des chemins: peut-elle survivre de manière indépendante ou être absorbée par La Presse?
La CN2i, qui regroupe les journaux Le Soleil (Québec), Le Droit (Ottawa-Gatineau), Le Nouvelliste (Trois-Rivières), Le Quotidien (Saguenay–Lac-Saint-Jean), La Tribune (Sherbrooke), La Voix de l’Est (Granby) et Les As de l’info, avait commandé une étude de faisabilité à la firme Malette il y a quelques mois. L’étude, livrée le 31 janvier, portait sur un possible partenariat avec La Presse.
« L’étude n’a pas été en mesure de dégager de scénario de collaboration ou de partenariat viables entre la CN2i et La Presse », a écrit Anthony Ouellette dans La Tribune, le 31 janvier.
Quelles sont les autres options pour la coopérative? La plus probable est de se saborder et que La Presse absorbe une partie de son personnel et récupère certains actifs. L’autre est de continuer, non sans implanter un plan de redressement qui impliquerait forcément de nouvelles compressions dans son personnel et ses activités.
Le scénario de l’absorption par La Presse est donc sur la table. Il implique la liquidation de la coopérative, qui doit être approuvée par 75% de ses membres, en assemblée spéciale. Des discussions confidentielles sont en cours en ce sens, selon le Journal de Québec.
Plusieurs sources qui désirent conserveur leur anonymat, dont un spécialiste des médias québécois consulté en janvier par Coopoint, considèrent que la survie de la CN2i est plus qu’improbable et que le scénario de l’absorption par La Presse est inévitable.
Selon lui, l’abandon du papier à la fin de 2023, pour économiser sur l’imprimerie et la distribution, s’est aussi traduit par une baisse dramatique des revenus, d’environ 16 M$, qui n’a pas été compensée par les abonnements numériques. « En cas d’absorption, c’est clair que ce sera La Presse qui va caller les shots, reprend-il. Un tel scénario se traduira par de nombreuses pertes d’emploi, car il y a aura des dédoublements. Et certains chroniqueurs perdront probablement leur tribune. Par exemple, on remerciera Richard Therrien pour conserver Hugo Dumas. La concentration de la presse québécoise qu’entraînera cette opération sera accrue: 7 de nos 12 quotidiens seront contrôlés par La Presse. »
La Presse canadienne, qui a relayé la nouvelle, affirme que la totalité des employés des salles de nouvelles de la CN2i devraient toutefois être absorbés par La Presse. Les deux organisations ont déjà une entente de partage de contenus éditoriaux et photographiques.
« Actuellement, il nous manque encore plusieurs informations avant de pouvoir nous positionner sur notre avenir. Ce qui est clair, c'est que nous allons porter la voix de nos membres en veillant à protéger durablement le plus d'emplois aux meilleures conditions possibles, en vertu de nos droits syndicaux applicables », déclare Karine Tremblay, présidente du Syndicat unifié de la presse écrite régionale (SUPER-CSN), qui a initié la relance des journaux et la création en 2019 de la CN2i après la faillite Capitales Médias. Cette dernière, créée par l’ex-militant libéral fédéral Martin Cauchon, avait racheté, de Power Corporation en 2015, la société Gesca, qui chapeautait les six quotidiens. Le syndicat compte 210 membres affiliés à la Fédération nationale des communications et de la culture (FNCC-CSN).
Contactée par Coopoint, Geneviève Rossier, directrice générale de la CN2i, n’a pas voulu commenter avant d’avoir terminé la discussion avec les membres de la coopérative. Ces derniers devraient statuer sur son avenir au cours du mois de février, a-t-elle précisé.
La relance des six quotidiens par la CN2i ne s’est pas faite sans controverse. Sollicité pour participer au plan de sauvetage de 21 M$, Desjardins avait refusé, puis s’était ravisé après une levée de boucliers publique. Le plan, appuyé notamment par Fondaction, le Fonds FTQ, la Fiducie du Chantier de l’économie sociale, la Caisse d’économie solidaire, le RISQ et Investissement Québec, s’est également traduit par la perte de 25% à 30% des actifs de la caisse de retraite des ex-employés de Capitales Médias (qui affichait un déficit actuariel de 65 M$ au moment de sa faillite), ce qui représente une perte moyenne d’environ 17 000$ par rente pour les retraités. En décembre 2024, les quatre associations de retraités des employés syndiqués retraités du Soleil, du Quotidien, du Nouvelliste et de la Voix de l’Est déposaient un recours en Cour supérieure pour récupérer les 68M$.
La fin des éditions papier, en décembre 2023, s’est aussi traduite par la perte de 125 emplois (sous forme de départs volontaires), soit le tiers des effectifs de la CN2i.
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